En marchés publics, un courrier électronique ne permet pas d’assurer une date certaine aux échanges dématérialisés. La pratique tendant à affecter aux courriers électroniques une capacité de notification demeure extrêmement risquée et doit être bannie.
Référence : Cour Administrative d’Appel de Nantes, 4ème chambre, 19/02/2021, 20NT00068
Les faits : Titulaire du lot « Isolation » de l’opération de construction de l’Ecole de nationale supérieure d’ingénieurs de Bretagne Sud, une entreprise de bâtiment souhaitait contester le décompte général établi par le maître d’ouvrage et notifié le 22 novembre 2013. En application des articles 13.44 et 50.1.1 du CCAG Travaux alors applicable, il lui appartenait de faire parvenir son mémoire en réclamation dans un délai de quarante-cinq jours, qui s’entend en jours calendaires, soit au plus tard le lundi 6 janvier 2014 à minuit. Il résulte de l’instruction que le mémoire en réclamation de la société Armor Isolation a été remis au maître d’ouvrage délégué le 7 janvier 2014.
Par ailleurs, le courrier électronique constitue un échange dématérialisé, au sens des stipulations de l’article 3.1 du CCAG, dont l’utilisation devait être précisée par les documents particuliers du marché. Or, les cahiers des clauses administratives ou techniques particulières du marché ne précisaient pas les conditions d’utilisation des moyens dématérialisés ou des supports électroniques. Dans ces conditions, compte tenu de la nécessité de sécuriser les échanges entre cocontractants et d’assurer une date certaine de réception de ces échanges, la société ne pouvait valablement adresser son mémoire en réclamation par simple courrier électronique.
Au surplus, s’il résulte du constat d’huissier réalisé à la demande de la société que le courrier électronique adressé à un représentant du maître d’ouvrage délégué et comportant en pièces jointes le courrier du 6 janvier 2014 et le mémoire en réclamation figure dans la partie » éléments envoyés » de sa messagerie électronique à la date du 6 janvier 2014 à 19 heures 50, en l’absence de production de tout accusé de réception de ce courrier électronique, la société n’établit aucunement que le destinataire a reçu notification de ces documents avant le 6 janvier 2014 minuit.
La société ne peut donc être regardée comme ayant pris toutes ses dispositions pour expédier son mémoire en réclamation en temps utile afin qu’il soit réceptionné avant l’expiration du délai de quarante-cinq jours qui lui était imparti pour adresser ce mémoire.
Notre conseil : bannir le courrier électronique lorsque les informations qu’il contient doivent être notifiées à leur destinataire avec date certaine de réception.
Votre réflexe professionnel : privilégier le courrier avec avis de réception, la remise contre récépissé, le fax, l’échange par la messagerie sécurisé du profil d’acheteur du client, ou le courrier électronique avec accusé de réception.
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Rédigé par Romain Reix
Formateur marchés publics & développeur commercial commande publique